Troubles du sommeil : quand faut-il s’inquiéter ?

Vous dormez moins bien qu’avant ? Cela vous inquiète ? Ce n’est peut-être pas grave. Et si ça l’est, il existe des solutions.

À jour le 9 mai 2025

Femme qui dort dans un lit

Ce qui est normal en matière de sommeil

Disons-le d’emblée: le sommeil change avec l’âge et c’est normal. Cela peut se refléter de plusieurs manières. «Ce que les gens âgés me disent souvent, c’est qu’ils dorment mal, qu’ils se réveillent fréquemment durant la nuit, ou alors qu’ils se réveillent très tôt le matin», explique Sébastien Grenier, psychologue et professeur agrégé au département de psychologie de l’Université de Montréal.

Pourquoi nous retrouvons-nous dans l’une ou l’autre de ces situations ? C’est qu’avec l’âge, des changements se produisent dans la structure du sommeil. Ainsi, les périodes de sommeil profond diminuent alors que les périodes de sommeil léger augmentent. «À cause de cela, certaines personnes se réveillent plus facilement durant la nuit et, le matin, elles peuvent avoir l’impression d’avoir dormi sur la corde à linge», précise M.Grenier, qui est aussi chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal.

Il ne faut pas s’alarmer. Comprendre ces changements aide à mieux les gérer, même s’ils nous rendent susceptibles d’éprouver des troubles du sommeil. De plus, d’autres facteurs, comme certaines maladies et certains médicaments, peuvent causer des troubles du sommeil. Lorsque les changements de notre sommeil nous affectent pendant la journée et nuisent à nos activités, il faut agir pour en traiter la cause.

En cas d’insomnie, il faut agir

Vous trouvez que vos problèmes de sommeil sont plus importants que ce que nous venons de décrire ? Il est possible que vous souffriez d’insomnie. Ce trouble, car c’en est un, se définit par des critères bien précis. Selon les experts, on parle d’insomnie lorsque l’on met plus de 30 minutes à s’endormir, lorsque l’on reste éveillé plus de 30 minutes au cours de la nuit, ou encore lorsqu’on se réveille au moins 30 minutes trop tôt.

Pour qu’il soit question d’insomnie, il faut que cela se produise au moins trois nuits par semaine et perdure depuis au moins trois mois. Il faut aussi que cette situation en vienne à affecter notre énergie, notre humeur ou notre capacité à fonctionner durant le jour. «Cela cause beaucoup de difficultés aux insomniaques, dit Sébastien Grenier, notamment dans leurs relations interpersonnelles.»

Quand elle est passagère (par exemple lorsqu’elle survient après un deuil ou un événement stressant), l’insomnie peut se résorber d’elle-même. Mais lorsqu’elle dure, elle peut mener à de l’anxiété, voire à une dépression. Si le problème persiste, il est donc important de consulter.

Pour en savoir plus sur la dépression, consultez l’article intitulé «Dépression: la reconnaître et agir en conséquence»publié sur cette plateforme.

Particularités selon la tranche d’âge

Les troubles du sommeil peuvent survenir à tout âge. La diminution des phases de sommeil profond et l’augmentation des phases de sommeil léger chez les personnes aînées les rendent plus susceptibles de développer des troubles de sommeil. Puisque ce processus s’installe graduellement, il est probable qu’il dérange plus les personnes de 80 ans que celles de 65 ans. Malgré ces changements physiologiques liés à l’âge, plusieurs personnes aînées n’éprouvent aucun problème de sommeil.

Cela dit, soyez attentif à la qualité de votre sommeil, car, si vous dormez mal, il est important de vous en rendre compte afin de pouvoir intervenir rapidement. À ce chapitre, une prise en charge précoce peut prévenir l’aggravation d’un trouble du sommeil et éviter qu’il ne déclenche d’autres problèmes de santé, comme des troubles cognitifs, cardiovasculaires ou métaboliques.

Comment éviter de souffrir de troubles de sommeil ou améliorer les choses ?

Vous aimeriez améliorer la qualité de votre sommeil ? Voici quelques conseils à cet effet.

Homme assit sur un lit qui regarde par la fenêtre

  • Durant la journée

    • Exposez-vous à la lumière du soleil, surtout celle du matin. Cela aide votre horloge biologique (ou votre rythme circadien) à se synchroniser correctement, car la lumière naturelle signale à votre cerveau qu’il est temps d’être éveillé et alerte.

    • Faites de l’activité physique régulièrement. Cela permet de réduire le stress et favorise un sommeil profond. Attention: l’activité physique ne doit pas se faire trop tard en soirée, car cela stimule votre système nerveux, ce qui vous empêchera de vous endormir.

    • Évitez de faire de longues siestes, et de vous y adonner en fin de journée – celles-ci doivent durer moins de 45 minutes et avoir lieu avant 15 h. Des siestes trop longues ou trop tardives peuvent perturber votre sommeil en réduisant votre fatigue naturelle qui s’accumule pendant la journée, ce qui est nécessaire pour bien dormir la nuit.

  • En fin d’après-midi et en soirée

    • Limitez ou évitez la caféine (café, thé, chocolat et boissons énergisantes). La caféine peut demeurer active dans votre corps jusqu’à 8 heures après sa consommation et perturber votre capacité à vous endormir naturellement.

  • Au souper

    • Pour faciliter votre digestion, faites en sorte que votre repas du soir soit léger et ait lieu au moins deux à trois heures avant de vous coucher. La digestion d’un repas copieux peut perturber votre sommeil en augmentant votre température corporelle et en sollicitant votre système digestif alors que votre corps devrait se mettre au repos.

  • En soirée

    • Buvez moins avant de dormir. Trop boire alors pourrait vous obliger à vous lever plus souvent au cours de la nuit.

    • Éviter ce qui peut perturber votre sommeil, soit:

      • L’alcool. Bien qu’il puisse faciliter l’endormissement, il fragmente le sommeil et réduit les phases de sommeil profond réparateur.

      • Le tabac. La nicotine est un stimulant qui retarde l’endormissement et peut provoquer des réveils nocturnes.

      • La lumière bleue des écrans (téléphone, tablette, ordinateurs). Elle inhibe la production de mélatonine, l’hormone qui signale à votre corps qu’il est temps de dormir.

  • Avant de vous coucher:

    • Installez des rideaux opaques à la fenêtre de votre chambre ou procurez-vous un masque pour les yeux. Cela vous permettra de vous protéger de la lumière extérieure. Si elle s’infiltre, même faiblement, dans votre chambre, elle risque de perturber votre production de mélatonine et de compromettre la qualité de votre sommeil.

    • Baissez la température dans votre chambre. Une légère baisse de la température corporelle favorise naturellement l’endormissement et améliore la qualité du sommeil profond.

  • En tout temps

    • Pratiquez le yoga ou encore effectuez des exercices de relaxation ou de respiration. Ces activités réduisent le niveau de cortisol (hormone du stress) et favorisent la production de mélatonine, préparant ainsi votre corps au sommeil. Pour vous guider, plusieurs outils et ressources sont proposés au bas de cet article.

    • Gardez votre chambre propre et confortable. Un environnement ordonné et agréable diminue l’anxiété et facilite des associations positives avec le sommeil.

    • Utilisez votre lit uniquement pour dormir ou avoir des relations intimes. Cette pratique renforce l’association mentale entre votre lit et le sommeil: un principe fondamental de l’hygiène de sommeil.

    • Levez-vous et couchez-vous toujours aux mêmes heures. Cette régularité contribue à synchroniser votre horloge biologique interne et optimise la qualité de votre sommeil.

Femme qui fait du yoga

Vous suivez tous ces conseils et avez toujours du mal à dormir ? Si votre période d’éveil dure plus de 20 minutes, levez-vous et adonnez-vous à une activité relaxante. Et retournez vous coucher seulement que lorsque l’envie de dormir vous revient. Vous aurez ainsi plus de chances de vous rendormir. Cette technique empêche votre cerveau d’associer le lit à l’insomnie ou à la frustration de ne pas dormir.

Quand et qui consulter

Vous avez du mal à dormir ? «Quelle que soit la source du problème, l’important, c’est de pouvoir en parler à une personne de confiance qui peut nous guider», recommande Sébastien Grenier. Vous prenez certains médicaments ? Vérifiez avec votre pharmacien s’ils ne pourraient pas être en cause. Vous souffrez de douleurs chroniques ou d’apnée du sommeil ? Parlez-en à votre médecin. Il vous aidera à trouver une solution.

Votre médecin choisit de vous prescrire un médicament pour vous aider à dormir ? Attention! Selon le Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription, les sédatifs, benzodiazépines ou hypnotiques généralement prescrits dans une telle situation, peuvent avoir un impact négatif, notamment sur la mémoire, la capacité de concentration et l’attention. Cela peut augmenter le risque de chute et le risque d’avoir un accident de voiture.

Selon Philippe De Grandpré, pharmacien au GMF Clinique familiale des Prairies, ainsi qu’au Carrefour interdisciplinaire en douleur chronique du CISSS de Lanaudière, l’utilisation de l’un ou l’autre de ces médicaments peut être appropriée dans certaines situations. Si cette solution est envisagée, discutez avec votre médecin de ses risques et bénéfices dans votre situation, ainsi que des solutions non pharmacologiques qui pourraient s’offrir à vous. Si un médicament vous est recommandé, rappelez-vous qu’il faut respecter la dose prescrite et consultez votre médecin ou votre pharmacien avant de la modifier ou de cesser la prise du médicament.

MM.Grenier et De Grandpré affirment que la majorité des gens qui éprouvent des troubles de sommeil chronique peuvent utiliser des mesures non pharmacologiques, c’est-à-dire sans médicaments, pour améliorer leur sommeil. «Plusieurs techniques de relaxation, comme la pleine conscience, peuvent être très efficaces», souligne Philippe De Grandpré. Ces approches ne vous conviennent pas ou n’ont pas été efficaces pour vous ? Plusieurs raisons peuvent expliquer cela. Certaines approches ne correspondent pas à tous les types d’insomnie et leur mise en pratique peut s’avérer difficile sans accompagnement. Ou alors, vous avez peut-être besoin d’une approche plus structurée. Dans ce cas, consulter un psychologue ou un psychothérapeute pourrait vous être bénéfique. Ce dernier vous proposera sans doute une thérapie cognitivo-comportementale, un traitement reconnu comme efficace pour contrer l’insomnie. «Cette approche est axée sur le présent et aidera la personne à comprendre la source de son insomnie, explique M.Grenier. Elle l’aidera également à changer certains de ses comportements ou croyances qui maintiennent l’insomnie.»

Homme qui se pose des questions

À retenir

  • Le sommeil est important, quel que soit l’âge. Cependant, il se modifie avec le temps. Avec l’âge, des modifications surviennent dans la structure du sommeil: diminution du sommeil profond et augmentation du sommeil léger.

  • Moins bien dormir en vieillissant, c’est normal! Cependant, souffrir d’insomnie, ce ne l’est pas. Cela nécessite une intervention, car l’insomnie risque d’avoir un impact sur plusieurs aspects de la santé mentale et cognitive.

  • Pour mieux dormir, il est recommandé d’adopter certains comportements qui favorisent le sommeil.

  • Vous avez essayé beaucoup de choses et cela ne semble pas fonctionner ? Il vous faut consulter un professionnel de la santé (médecin, pharmacien ou infirmière). Vous pourrez discuter avec lui des stratégies que vous avez mises en place et des difficultés que vous avez connues.

  • Pour vaincre l’insomnie, il peut être utile de consulter un psychologue. C’est alors la thérapie cognitivo-comportementale qui est recommandée.

  • Lorsqu’il est question de troubles du sommeil, les médicaments ne devraient être prescrits que dans de rares cas, et pour de courtes périodes. Si vous devez en prendre, il faudra vous assurer de respecter la dose prescrite et de ne pas les arrêter sans d’abord en parler à votre médecin ou pharmacien.

À l’intention des proches aidants

Nous savons que les troubles du sommeil de votre proche peuvent être préoccupants pour vous aussi. Voici quelques suggestions pour l’accompagner.

  • Vous remarquez des changements dans son comportement, comme une somnolence inhabituelle ou un stress accru ? Informez-vous de la qualité de son sommeil en lui disant que vous vous préoccupez de son bien-être.

  • Offrez-lui votre soutien de manière constructive. Par exemple, explorez avec lui des stratégies qui pourraient l’aider à améliorer son sommeil, encouragez-le à consulter des professionnels de la santé qui pourront lui offrir une aide adaptée à sa situation et suggérez-lui de l’accompagner dans ses démarches auprès de ces professionnels.

  • Rappelez-vous que votre rôle est d’être présent et à l’écoute: pas de résoudre tous les problèmes.

  • Notez que les recommandations sur le sommeil présentées dans cet article s’appliquent aussi à vous. En étant bien reposé, vous serez mieux outillé pour offrir un soutien de qualité à votre proche.

Rédaction: Maryse Guénette

Révision interne: Équipe de la Fondation AGES

Réviseurs scientifiques: Dr Sébastien Grenier, psychologue et Philippe De Grandpré, pharmacien

Révision linguistique: François Grenier

Références

ALVAREZ-BUENO, Celia. Napping and cognitive decline: A systematic review and meta-analysis of observational studies. 2022. https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC9479293/

CLARK, Ian et Hans Peter LANDOLT. Coffee, caffeine, and sleep: A systematic review of epidemiological studies and randomized controlled trials. Sleep Medicine Reviews, vol. 31, 2017, p. 70–78. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26899133/

DUFFY, Jeanne F. et Charles A. CZEISLER. Effect of light on human circadian physiology. Sleep Medicine Clinics, vol. 4, no 2, 2009, p. 165–177. https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC2717723/

DUGAS, E. N. et autres. Nicotine dependence and sleep quality in young adults. Addictive Behaviors, vol. 65, 2017, p. 154–160. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27816041/

HAMANN, Jean. Une thérapie comportementale contre l’insomnie aussi efficace que les somnifères pour atténuer les manifestations diurnes du manque de sommeil. Université Laval, Recherche, janvier 2024. https://nouvelles.ulaval.ca/2024/01/16/une-therapie-comportementale-contre-linsomnie-aussi-efficace-que-les-somniferes-pour-attenuer-les-manifestations-diurnes-du-manque-de-sommeil-a:ed9967f0-d425-4b99-8a57-5cf88e5feede

IRISH, Leah A. et autres. The role of sleep hygiene in promoting public health: A review of empirical evidence. Sleep Medicine Reviews, vol. 22, 2015, p. 23–36. https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC4400203/

KREDLOW, M. Alexandra et autres. The effects of physical activity on sleep: A meta-analytic review. Journal of Behavioral Medicine, vol. 38, no 3, 2015, p. 427–449. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25596964/

LEMIRE, Stéphane et Jacques BEAULIEU. Vieillir, la belle affaire : garder son pouvoir d’agir. Montréal, Éditions Trécarré, 2019, 336 p. https://editionstrecarre.groupelivre.com/products/vieillir-la-belle-affaire?variant=42638364442881

LI, Junxin et autres. Daytime napping and cognitive health in older adults: A systematic review. Journal of Gerontology: Series A – Biological Sciences and Medical Sciences, vol. 78, no 10, 2022, p. 1853–1860. https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC10562891/

OKAMOTO-MIZUNO, Kazue et Koh MIZUNO. Effects of thermal environment on sleep and circadian rhythm. Journal of Physiological Anthropology, vol. 31, 2012, article 14. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22738673/

PARK, Julia K. M. et autres. The acute effects of alcohol on sleep architecture in late adolescence. Alcoholism: Clinical and Experimental Research, vol. 37, no 10, 2013, p. 1720–1728. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23909696/

RÉSEAU CANADIEN POUR L’USAGE APPROPRIÉ DES MÉDICAMENTS ET LA DÉPRESCRIPTION. Bien dormir sans médicament. 2025. https://www.reseaudeprescription.ca/sommeil

SOCIÉTÉ QUÉBÉCOISE DE GÉRIATRIE. Prise de position sur l’évaluation et la prise en charge de l’insomnie chez la personne âgée. Octobre 2019. https://www.sqgeriatrie.org/documentation.php?catId=4

ST-ONGE, Marie-Pierre et autres. Effects of diet on sleep quality. Advances in Nutrition, vol. 7, no 5, 2016, p. 938–949. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27633109/

TÄHKÄMÖ, Leena et autres. Systematic review of light exposure impact on human circadian rhythm. Chronobiology International, vol. 35, no 10, 2018, p. 151–170. https://doi.org/10.1080/07420528.2018.1527773

TRAUER, James M. et autres. Cognitive behavioral therapy for chronic insomnia: A systematic review and meta-analysis. Annals of Internal Medicine, vol. 163, no 3, 2015, p. 191–204. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26054060/

UNIVERSITÉ LAVAL. Sommeil et bien-être. s. d. https://www.ulaval.ca/mon-equilibre-ul/mes-habitudes-de-vie/sommeil-et-bien-etre

UNIVERSITÉ LAVAL – CIRRIS. Les critères diagnostiques du syndrome d'insomnie. s. d. https://www.cirris.ulaval.ca/wp-content/uploads/2021/07/Criteres-diagnostiques-de-linsomnie.pdf

VAN MAANEN, Annette et autres. The effects of light therapy on sleep problems: A systematic review and meta-analysis. Sleep Medicine Reviews, vol. 29, 2016, p. 52–62. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26606319/

Ce contenu vous a été utile ?